Les fonctionnaires exclus temporairement de leurs fonctions pour un motif disciplinaire s’interrogent souvent à juste titre sur la possibilité de bénéficier du chômage.

Le 4 février 1988, le Tribunal administratif de Paris avait jugé qu’un agent titulaire d’une commune exclu de ses fonctions pour une durée d’un an devait être regardé comme involontairement privé d’emploi au sens des dispositions du code de travail alors en vigueur.

Cette jurisprudence n’est plus d’actualité.

En effet, par une décision du 3 juin 2019, le Conseil d’Etat auquel avait été soumis une question prioritaire de constitutionnalité  dirigée contre l’article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statuaires relatives à la fonction publique territoriale en ce que ces dispositions feraient obstacle à l’attribution du revenu de remplacement prévu par l’article L. 5422-1 du code du travail, aux termes duquel « ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs involontairement privés d’emploi (…) , aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure », a jugé que :

« si une sanction d’exclusion temporaire prononcée, sur le fondement de ces dispositions, à l’encontre d’un agent de la fonction publique territoriale entraîne pour celui-ci la cessation provisoire de ses fonctions et la privation, pour la même durée, de la rémunération qui leur est attachée, elle n’a pas pour effet de le priver de son emploi, l’agent conservant son emploi pendant la période d’exclusion et étant réintégré dans ses fonctions au terme de cette période. Madame B…n’est, par suite, pas fondée à soutenir que les dispositions contestées méconnaissent les dispositions du cinquième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 aux termes desquelles :  » Chacun a le devoir de travailler et le droit d’occuper un emploi (…) « . Est à cet égard sans incidence la circonstance que, ainsi qu’elle l’allègue, l’application de ces dispositions aurait pour effet de la priver du bénéfice des dispositions de l’article L. 5422-1 du code du travail citées ci-dessus.

Par ailleurs, alors même que l’agent exclu temporairement ne pourrait, ainsi qu’elle l’allègue, prétendre, pendant la période où court cette sanction, à l’allocation d’assurance prévue par l’article L. 5422-1 du code du travail, cette circonstance n’a pas, par elle-même, pour effet d’empêcher l’agent de percevoir un revenu pendant cette même période. L’exécution de la sanction ne fait, ainsi, notamment obstacle ni à ce que l’agent public exerce, tout en conservant son emploi public, un autre emploi, sous réserve du respect des obligations déontologiques qui s’imposent à lui, ni à ce qu’il sollicite, s’il s’y croit fondé, le bénéfice du revenu de solidarité active prévu par l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles. Mme B…n’est, par suite, pas fondée à soutenir que les dispositions contestées, telles qu’interprétées par la jurisprudence du Conseil d’Etat, méconnaissent le droit à des moyens convenables d’existence qui résulte des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 » (CE, 3 juin 2019, n° 424377).

La Cour administrative d’appel de Marseille à laquelle cette affaire a été renvoyée a jugé :

« Il ressort des pièces du dossier que Mme E… a fait l’objet le 27 juillet 2017, ainsi que cela a été exposé au point 1, d’une décision du maire lui infligeant la sanction d’exclusion temporaire des fonctions pour deux ans. En refusant de lui délivrer, par la décision contestée du 23 août 2017, l’attestation qu’elle demandait en vue de solliciter, sur le fondement de l’article L. 5422-1 du code du travail, le bénéfice d’un revenu de remplacement au motif qu’en dépit de son exclusion temporaire de deux ans de la fonction publique, elle n’était pas éligible à l’allocation chômage car non privée d’emploi au sens de l’article L. 5424-1 du même code, le maire de Buoux n’a pas méconnu les dispositions précitées du code du travail » (CAA Marseille, 5 mars 2020, 18MA04233).

Il ressort de ces décisions, qui sont également applicables à la fonction publique d’Etat et à la fonction publique hospitalière, que  :

  • l’exécution de la sanction ne fait pas obstacle à ce que l’agent public exerce, tout en conservant son emploi public, un autre emploi, sous réserve du respect des obligations déontologiques qui s’imposent à lui;
  • l’agent exclu temporairement, s’il cesse provisoirement d’exercer ses fonctions, n’est pas pour autant privé d’emploi de sorte qu’il ne peut prétendre au bénéficie de l’allocation chômage;
  • l’agent peut, s’il s’y croit fondé, demander le bénéfice du revenu de solidarité active prévu par l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles.

Si vous souhaitez contester une décision d’exclusion de fonctions et/ou formuler une demande indemnitaire à la suite d’une telle mesure jugée illégale, je vous accompagne.

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